31 décembre 2021

Le bouquiniste Mendel - Stefan Zweig

 Auteur : Stefan Zweig

Editeur : Editions Sillage

Genre : Littérature autrichienne, classique

Parution : 01 Janvier 2013   -   60 pages



Ma note :
⭐⭐⭐⭐⭐


Vienne, fin de la Première Guerre Mondiale.
Un homme, surpris par une averse, entre dans un café du vieux Vienne. Cet endroit lui est bien connu, il sait qu'il est déjà venu mais n'arrive pas à se souvenir. Cela fait plus de vingt ans. Puis, comme un éclair, la mémoire lui revient. Il s'agit du café Gluck, quartier général de Jakob Mendel, un bouquiniste du coin qui y passait beaucoup de temps. Il aimait s'y attabler et délivrer des conseils sur les livres avec toute personne partageant sa passion.
Mais, aujourd'hui, Jakob Mendel ne vient plus. Qu'est-il devenu ?
"Jakob Mendel ! Comment avais-je pu l'oublier si longtemps, cet homme extraordinaire, ce phénomène, ce prodige insensé, célèbre à l'université et parmi un petit cercle de gens qui le respectaient fort - comment ne plus se rappeler ce magicien, ce prestigieux bouquiniste qui, continuellement assis là, tous les jours, du matin au soir, tel l'emblème de la connaissance, avait fait la gloire et la renommée du café Gluck !
Il me suffit de fermer les yeux une seconde pour regarder en moi-même, et aussitôt il apparut, éclairé nettement sur l'écran rose de mes paupières."
Jakob Mendel était un homme passionné par ses livres, une bibliothèque vivante et tout le monde le connaissait. Il était tellement absorbé par ses ouvrages qu'il ne s'intéressait à rien d'autre. Les actualités, les journaux lui étaient complétement étrangers. En 1914, il ne s'est pas rendu compte qu'une guerre était sur le point d'éclater.

En raison des correspondances qu'il entretenait, il a été arrêté puis envoyé dans un camp de concentration.
Comment un homme si bon, n'ayant jamais penser, ni fait le moindre mal à qui que ce soit, a-t-il pu basculer dans une telle horreur, enfermé, maltraité, loin de ses livres, de ses repères et de son univers.

Une seule question demeure : qu'est-il devenu ? Où est-il ?

Cette courte nouvelle est publiée une première fois en 1929 sous le titre "Buchmendel". Stefan Zweig y évoque les conséquences de la guerre sur l'humain, un thème qui le touche profondément. A cette date, Zweig vit encore en Autriche, le nazisme ne s'est pas encore imposé dans le pays. Mais, il arrive. Ce n'est qu'une question de temps. Il sera à son apogée quelques années plus tard d'où les années d'errance et l'exil de Zweig en Angleterre puis au Brésil où il finira sa vie prématurément.

J'ai beaucoup aimé l'écriture rythmée de cette nouvelle notamment grâce aux mots justes utilisés par le narrateur à l'évocation de ses souvenirs. Un beau texte, empreint de poésie.
"On ne fait les livres que pour unir les hommes par-delà la mort et nous défendre ainsi contre les adversaires les plus implacables de toute vie : l'évanescence et l'oubli."




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